Se détacher


Se détacher dans la douleur,
dans les strates accomplies de la douleur,
celle qui première tend sa croix au monde,
celle qui saigne sa lumière singulière.
Et creuser,
creuser la mystique du corps,
creuser la défaite de la chair,
celle qui s’achève dans la nudité,
quand le corps fait silence,
qu’il nous fait aimer ce qui brûle les yeux,
et nous ramène à l’échéance de nos membres.


Que l’écriture soit en sang,
qu’elle saigne sa nuit même dans l’effusion des étoiles.
Qu’elle ne cherche ni raison, ni prestige,
mais s’imprègne de l’humilité de l’air.
Qu’elle jaillisse d’une quête souveraine,
qu’elle s’écoule comme la flamme du soir sur la mer allongée,
quand le corps déversé, malade et infirme,
quand le corps se délivre qui s’allège de part en part.


Se dépouiller dans la grâce,
Et, dans la grâce, se suspendre au sourire du ciel.
Ne chercher ni secours, ni victoire,
mais se soumettre tout entier au ruissellement du Soleil.
Se répandre dans l’épanchement du jour.
Se confondre dans les modulations du vent.
Ecrire, retranscrire tout cela.
Rejoindre la chair dans les conversations du sensible.
La reconnaître une et pure sous la brûlure du sublime.