Hommage à Simone Weil


Se détacher dans la douleur,
dans les strates accumulées de la douleur,
celle qui première tend sa croix au monde,
celle qui saigne sa lumière singulière.
Et creuser,
creuser la mystique de la chair,
creuser la nudité qui achève,
quand le corps fait silence,
quand il faut aimer ce qui mord les entrailles
et nous ramène à l’échéance de nos membres.


Que l’écriture soit en sang,
qu’elle saigne sa nuit même dans l’effusion des étoiles.
Qu’elle ne cherche ni raison, ni prestige,
mais s’abreuve de l’humilité de l’air.
Qu’elle jaillisse d’une quête souveraine,
puis s’écroule comme la flamme du soir sur la mer allongée,
quand le corps déchiré, malade ou infirme,
quand le corps se déverse qui s’efface de part en part.


Se dépouiller dans la grâce,
et, dans la grâce, s’éprendre du regard du monde.
Ne chercher ni secours, ni issue,
mais se soumettre tout entier au ruissellement des heures.
Se rendre dans l’épanchement du ciel.
Se fondre dans les modulations du vent.
Ecrire, retranscrire tout cela.
Rejoindre la chair dans les confidences du sensible,
la reconnaître une et nue sous la brûlure du sublime.