Peser




Ecrire. Peser. Dire au plus vrai ces infimes
variations au ras de l’être,
au ras de l’âme,
dire au plus clair la vérité entrecoupée de silences.


Et sonder, sonder l’immensité des choses,
sonder la vie tête première,
y jeter son âme au risque de se perdre,
et tant pis si la fièvre est trop forte,
et tant mieux si la chute est trop belle.


Creuser, creuser jusqu’au sublime,
creuser jusqu’à ce que tout cède,
les larmes après tant d’années,
la douleur où perce le divin,
la solitude rattrapée dans la chair humaine
– oui la solitude achevée dans la chair humaine.
Le corps encore,
Mais qu’avons-nous d’autre qu’un corps
pour connaître le monde ?
C’est si faible un corps, c’est si fragile.
Et si haute est l’espérance qui l’appelle
à sa ruine.


Creuser. Et sous le sable, forcer l’épaisseur.
Jusqu’au fond, franchir l’éternité brûlante,
franchir l’éternité surtout si elle brûle.
Sentir comme elle brûle !
Sentir comme elle ne triche pas.
Car rien ne peut mentir
qui se donne à aimer.


Et le malheur et le bonheur,
la vie qui court à l’échéance de son drame,
tout ce qui se rend dans l’urgence,
sur l’étendue de la mer, dans la phrase de chaque vague,
sur l’émotion d’un corps, dans la vague de chaque geste,
aimer cela et creuser plus encore,
au risque de flancher,
au risque de faillir.
Se laisser dépouiller pour se laisser emplir.


Sur toute la gamme du sensible
écrire la beauté de grandir,
chanter la grandeur de mûrir.


Pour confier le lever d’une seule rose
au sourire de la terre étonnée.